Traumatisme vicariant :
Quand l’écoute peut marquer celui qui aide !
Traumatisme vicariant
Quand l'écoute peut marquer celui qui aide
Publié le 21 août 2025
Il survient lorsque nous sommes exposés de manière répétée aux récits ou aux conséquences d’événements traumatisants vécus par d’autres.
En tant que psychologue, je suis régulièrement témoin de récits d’une intensité émotionnelle forte.
Certaines personnes que j’accompagne ont traversé des épreuves profondes : violences physiques et psychologiques, accidents, pertes brutales, maladies graves.
Dans ma clinique, j’utilise notamment :
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La thérapie de reconsolidation de la mémoire, pour aider à désactiver la charge émotionnelle liée à un souvenir traumatisant et ainsi traiter le syndrome de stress post traumatique ;
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ou les approches cognitivocomportementales (TCC), qui invitent la personne à transformer peu à peu sa relation subjective au traumatisme, notamment à travers l’exposition prolongée (EP). Les souvenirs intrusifs – qu’il s’agisse de flashbacks, de cauchemars ou de pensées envahissantes – découlent d’un conditionnement à certains stimuli internes ou externes présents lors de l’événement. Avec le temps, ces signaux se généralisent et continuent à activer le système nerveux central, perçus comme des menaces réelles, déclenchant alors des réactions émotionnelles intenses et douloureuses. Pour tenter d’y échapper, il est fréquent d’adopter des stratégies d’évitement : éviter certains lieux, images ou sensations. Si cela procure un soulagement immédiat, cette fuite nourrit le cercle vicieux des intrusions sur le long terme, maintenant ainsi le trouble de stress post-traumatique (TSPT). Il est donc crucial de rappeler que l’évitement, loin de protéger, contribue à entretenir la souffrance.
Ces méthodes nécessitent de plonger avec le patient dans le souvenir, de revisiter les images, les sons, les sensations.
Et, même si ce n’est pas notre propre histoire, notre cerveau et notre corps peuvent réagir.
C’est cela, le traumatisme vicariant : une empreinte émotionnelle indirecte, liée à l’empathie et à la proximité avec la souffrance d’autrui.
Est-ce un « manque de recul » ?
Il est important de le dire : ressentir cette empreinte ne signifie pas être « trop sensible » ou « pas assez professionnel ».
C’est une réaction humaine normale. Notre empathie, qui est au cœur de la relation thérapeutique, a un prix : celui de nous exposer, à petite dose, à ce que vivent nos patients.
Prévenir et gérer le traumatisme vicariant :
Au fil du temps, j’ai construit des repères pour protéger ma propre santé émotionnelle et continuer à exercer dans la durée :
1. La supervision
C’est un espace de réflexion professionnelle où je peux analyser les situations, prendre du recul et recevoir un regard extérieur.
C’est aussi une sécurité éthique et personnelle. J’en ai parlé dans mon précédent article, car c’est pour moi une ressource incontournable.
2. L’ancrage
Rester connectée à l’instant présent est essentiel pour éviter de rester imprégnée d’histoires difficiles.
Mes deux samoyèdes, Puntellu et Vincidore, sont devenus de véritables alliés dans cette démarche.
Leur présence, leurs balades en montagne, leur joie simple me ramènent dans “l’ici et maintenant” après une journée chargée émotionnellement.
3. Des temps de récupération planifiés
Cela peut sembler évident, mais programmer volontairement des moments de repos mental est crucial : marche, lecture, sport, méditation…
Un message pour les professionnels et les aidants :
Le traumatisme vicariant ne concerne pas seulement les psychologues. Il peut toucher les soignants, les éducateurs, les pompiers, les bénévoles associatifs, les policiers et gendarmes, et toute personne en contact régulier avec la détresse humaine.
Prendre soin des autres, c’est aussi apprendre à reconnaître ses propres signaux d’alerte, à s’accorder du temps, et à s’appuyer sur un réseau de soutien.
