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L’incivilité : quand le lien social se fissure… ce que la psychologie peut en dire

Pourtant, l’incivilité n’est pas anodine. Elle fragilise le lien social, mine la confiance, et contribue à une ambiance délétère, que ce soit dans la sphère personnelle, professionnelle ou publique.

Qu’est-ce que l’incivilité ?

L’incivilité désigne un comportement qui transgresse les règles implicites du vivre-ensemble, sans pour autant relever du délit ou de la violence physique. Elle se situe à la frontière de l’impolitesse et de l’agressivité, et prend des formes diverses : interruption de parole, manque de politesse, gestes déplacés, ton méprisant, retards non justifiés, non-respect des engagements, etc.

Ces actes peuvent sembler mineurs. Pourtant, leurs effets cumulatifs sont puissants : sentiment d’insécurité, perte de repères, crispation relationnelle, voire retrait social.

Un phénomène révélateur d’un mal-être plus profond.

En tant que psychologue, j’observe l’incivilité sous deux angles :

  •  Dans la société,

Elle reflète souvent une fatigue émotionnelle collective, un désengagement du lien à l’autre, parfois même un effondrement des repères relationnels. Dans un contexte où chacun est soumis à des pressions multiples — économiques, sociales, numériques — les ressources pour contenir et exprimer les émotions de manière ajustée peuvent s’amenuiser.

  • Dans la relation thérapeutique,

L’incivilité peut prendre des formes plus subtiles : retards répétés sans prévenir, annulations de dernière minute, familiarité déplacée, messages envoyés sans égard pour le cadre, voire manifestations d’hostilité passive ou directe.

Cela touche directement la posture professionnelle du psychologue, qui, s’il reste contenant et bienveillant, a aussi besoin d’un cadre sécurisé pour que le travail thérapeutique puisse s’ancrer.

Mais pourquoi est-ce important d’en parler ?

Parce que l’incivilité n’est pas qu’un problème de politesse. Elle est souvent un symptôme. Un symptôme de stress chronique, de surcharge émotionnelle, de difficulté à contenir ou exprimer ses émotions, ou encore de trajectoires relationnelles douloureuses qui laissent des marques.

Par exemple, une personne qui se montre sèche, voire agressive, peut en réalité être envahie d’angoisse, ne pas savoir comment poser une limite, ou se sentir menacée sans pouvoir le verbaliser. Dans ce cas, l’incivilité devient une forme de décharge émotionnelle mal canalisée.

 Et si l’incivilité était une émotion qui déborde ?

Ce regard propose de décentrer le jugement moral, sans pour autant excuser le comportement. Il s’agit d’explorer l’hypothèse suivante :

Et si ce comportement révélait simplement un trop-plein émotionnel, une tension qui cherche une issue, faute de régulation possible ?

Cela ne signifie pas que toute incivilité doit être tolérée, mais qu’elle gagne à être comprise. Comprendre, c’est se donner une chance de transformer.

Le rôle du psychologue

Dans cette perspective, le psychologue a un double rôle :

1. Comprendre, sans excuser

L’objectif est d’analyser la fonction du comportement :

  • Est-ce une réponse automatique au stress ?

  • Une tentative de réaffirmer son existence dans un contexte perçu comme insécurisant ?

  • Une répétition d’un schéma relationnel ancien, dans lequel la relation à l’autre est perçue comme menaçante ou instable ?

À travers l’analyse fonctionnelle, il est possible d’amener la personne à prendre conscience de l’intention derrière le comportement, même si celui-ci est inadapté.

2. Aider à mieux réguler

L’accompagnement psychologique permet de développer :

  • Une meilleure conscience émotionnelle

  • Des stratégies de communication plus ajustées

  • Un respect de soi et des autres, dans les interactions quotidiennes

Il s’agit aussi, souvent, de reconnecter la personne à ses valeurs :

  • Quel type de personne souhaite-t-elle être dans ses relations ?

  • Que ressent elle lorsqu’elle dépasse les bornes de ce qu’elle juge juste ?

  • Comment faire autrement lorsque la tension monte ?

Réhabiliter la relation

L’incivilité ne doit pas être banalisée, mais elle ne doit pas non plus être réduite à une simple faute. En la considérant comme un signal, un symptôme d’un lien social ou interne abîmé, nous ouvrons la voie à une approche plus humaine, plus constructive.

Et c’est précisément ce que permet la psychologie : remettre du sens là où la réaction a pris le pas sur la relation.

L’incivilité : quand le lien social se fissure… ce que la psychologie peut en dire

Publié le 16 juin 2025
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